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Label Blue
7 octobre 2006

Le savon selon Blue

bainVoilà, ça fait 2 ans que je m'y prépare...si si, DEUX ans !

D'abord le temps de me documenter, de lire et de lire encore, de trouver la soude aussi (pas trouvée dans les magasins de bricolage du coin !!!)...puis ma maladie m'est tombée dessus et j'ai été incapable de me lancer là dedans puis ensuite très craintive de manipuler la soude avec des mains pas à 100%...alors j'ai encore lu, livres, sites, forums...

Le week-end dernier, j'ai observé une démonstration chez Hooly, c'est Missand des Flâneries qui faisait l'élève, moi j'ai préféré regarder et poser les dernières questions qui me restaient.

J'ai pu constater que je devais en être capable, à condition de bien prendre toutes les précautions qui s'imposent, encore plus dans  mon cas.

Et hier, je suis passée à l'action...

Je ne vais pas me contenter de vous montrer une photo de mes bébés savons, non, non, vous n'allez pas vous en tirez à si bon compte...D'abord un peu de théorie (mieux vaut une fois de plus) et ensuite un peu de philosophie...enfin, ma philosophie perso du truc...

bain1Le savon, qu'est ce que c'est ?

Le savon est le produit de la réaction de saponification qui se résume, pour les non-chimistes, comme suit :

Gras + soude = savon + glycérine (la glycérine est en général récupérée par les industriels pour d'autres usages comme...enrichir des savons ;-) )

NB : la soude est utilisée pour des savons solides, la potasse pour des savons liquides

La soude

molecNaOH2La soude est de la soude caustique NaOH à ne pas confondre avec les cristaux de soude qu'on utilise pour la lessive et certaines tâches ménagères, qui sont en réalité des cristaux de carbonate de soude Na2CO3. Voir articles sur la soude et sur le carbonate de soude sur Wikipédia.
En France elle se trouve dans les magasins de bricolage (attention, ils peuvent aussi vendre des cristaux=carbonate), bien acheter de la soude pure, et non un décapant ou un déboucheur qui en contient, seule la soude pure convient à la fabrication de savon.
Préférez la version pure en petites billes à une lessive de soude, version liquide diluée dans l'eau, qui vous exposerait à de savants calculs afin de retomber sur vos pieds pour obtenir la quantité requise, calculs source d'erreurs pouvant avoir des conséquences dramatiques.

En effet, quand on dit "soude caustique", le mot caustique n'est pas là pour faire joli, ce n'est pas une vue de l'esprit, si la soude venait à cotoyer votre peau, elle l'attaquerait aussitôt sans demander préalablement la permission et causerait brûlures et plaies profondes. Pour la même raison, il convient d'employer uniquement des usensiles en verre, en acier inox ou en plastique, plastique et verre devant en plus résister à la chaleur.

La fabrication de savon demande donc une grande prudence, une tenue protégeant bien la peau (pensez à vos pieds), des gants (idéalement superposer gants minces en latex et gros gants de ménage) et un masque ou des lunettes de protection. La dilution de la soude provoquant des vapeurs toxiques, vous pouvez ajouter un masque genre masque à poussière. Il vous faut travailler dans un local aéré, et procéder à la dilution de la soude devant une fenêtre ouverte.

J'ai dû faire le tour de la question sur la soude, voyons maintenant le choix du gras.

oilL'huile

Le gras peut être du gras animal ou du gras végétal, les savons du commerce affichent rarement leur composition en gros, "tallowate" dans la composition INCI, c'est du suif...outre l'aspect éthique pour celles qui ne veulent pas tuer d'animaux, il est clair que ce suif n'est pas de provenance d'animaux élevés biologiquement, de filières propres, et qu'on ne sait pas par où il est passé avant d'arriver chez le savonnier.

Vous noterez aussi dans la composition INCI de la majorité des savons, outre les différents gras (tallowate, olae europae pour l'olive, cocos nucifera, etc.) et la soude (sodium hydroxyde) des additifs divers et variés tous plus nocifs pour notre peau et l'environnement les uns que les autres...c'est le cas de l'EDTA, ou editronic acid, voir ICI les joyeusetés ce ce toxique.

Personnellement, j'ai fait le choix de gras d'origine 100% végétale (voir ci-dessus) y compris dans le but de fabriquer du savon à lessive, nos ancêtres utilisant depuis longtemps du vrai savon de Marseile, soit du savon fabriqué à partir d'huile d'olive, plus éventuellement de l'huile de palme et/ou de coco.
Je reviendrais dans un autre article sur l'usage de l'huile de palme qui n'est pas le sujet d'aujourd'hui...

L'huile qui participe au processus de saponification est en contact avec la soude et va donc être irrémédiablement dégradée par celle-ci, donc quel intérêt me direz vous de prendre une huile chère de qualité puisque ses propriétés sont perdues ?
Pourtant, j'ai décidé dans la mesure du possible (et de la compatibilité avec mon porte-monnaie) d'utiliser des huiles bio ou les plus brutes possible. Pourquoi ?
D'abord pour éviter la présence dans mon savon de résidus de pesticides, engrais, produits de raffinage et autres cochoncetés...et d'autre part pour ne pas, autant que faire se peut, favoriser les filières agro-alimentaires non éthiques.

Le surgraissage

Si vous mettez en contact avec la soude, la stricte  quantité de gras nécessaire à la saponification, une fois la réaction terminée, vous aurez uniquement du savon (et la glycérine qui va avec)...Vous avez certainement entendu parler des savons surgras...Faire votre savon maison, c'est aussi vous donnez la possibilité de le surgraisser en introduisant plus de gras que nécessaire à la réaction de saponification, on aura alors :

gras + soude = savon + glycérine + surgras

Mais me direz vous comment calculer toutes les quantités nécessaires ?
Il existe sur le net un excellent outil fiable et pratique d'emploi avec un seul "défaut", il est anglophone...mais même en anglais, il reste facile à utiliser...c'est le calculateur (cliquer sur Lye calculator) proposé par le site de Majestic Mountain Sage

Comment calculer les proportions d'huiles (ou beurres), de soude et d'eau ?

calculC'est tout simple...il suffit d'indiquer, après avoir choisi son unité de mesure, dans le calculateur la quantité d'huiles et beurres, en saisissant le chiffre dans les cases correspondant à chaque nature d'huile.
Vous obtiendrez alors une fourchette pour votre quantité d'eau à utiliser et la quantité de soude en fonction du surgraissage souhaité exprimé en pourcentage.

Oui mais...Si vous mélangez toutes vos huiles et que vous utilisez le mélange ainsi réalisé pour mélanger à la soude, vous aurez certes un savon sugraissé au pourcentage choisi, oui mais sugraissé à quelle huile ?
Ca ne me plaisait pas que, si j'ajoute une bonne petite huile bien précieuse, la soude l'utilise pour faire les molécules de savon et me laisse en surgraissage l'huile d'olive ou de coco de base...Groumph !

J'ai donc choisi de procéder autrement !
Je calcule la quantité de soude à utiliser pour un savon sans surgraissage (le chiffre en face de 0% dans le calculateur), puis je calcule moi même mon poids d'huile de sugraissage en fonction du poids total de mes huiles. Ce qui me permet d'ajouter mon huile de sugraissage "à la trace" (expression d'initiés qui sera expliquée ci-dessous), étape du processus de fabrication au moment duquel 95 % de la saponification est réalisée ! Ainsi la majorité de mon huile choisie pour le surgraissage restera bien non saponifiée.

La quantité d'eau à utiliser est donnée sous forme d'une fourchette...Si on utilise la quantité d'eau maximum proposée, forcément le savon sera plus long à sécher, toutefois, je suppose que cette quantité utilisée influe sur la rapidité de réactio de saponification, et que si on met peu d'eau, cela risque d'être trop rapide, donc on disposera de trop peu de temps pour incorporer les additifs et verser dans les moules avant que le savon ne soit trop épais. Pour le moment j'ai choisi d'utiliser une quantité d'eau, disons...dans la moyenne haute...

couleursLes additifs : l'odeur et la couleur

Lorsqu'on ajoute "l'odeur", à la trace (si si vous alez bientôt savoir ce que c'est, vous les non inités...), il y a encore de la soude disponible dans le mélange...et surtout, le mélange est chaud ! En effet, la dissolution de la soude dans l'eau (et peut-être la réaction de saponification, à vérifier) provoque un dégagement de chaleur ! Envolées donc les belles propriétés des huiles essentielles qu'on choisirait pour parfumer notre savon...mais il reste leur odeur...enfin il reste leur odeur, selon la quantité utilisée (il en faut pas mal...aïe aïe le porte-monnaie) et les huiles essentielles choisies (l'utilisation d'HE d'agrumes s'avère décevante, leur odeur persistant peu...je ne parle pas d'expérience, je n'ai pas encore testé...).

Il est également possible d'utiliser des fragrances vendues exprès pour mais, hélàs, c'est réintroduire dans un savon que je souhaite le plus naturel possible un produit issu de la chimie...

J'ai donc choisi de fabriquer des savons en utilisant soit des huiles essentielles bon marché (lavandin, litsée citronnée, etc.) soit "natures" que je parfumerai ensuite en utilisant la technique de la refonte (voir recette sur le site feminin.ch par exemple)...J'avoue que je craquerai peut être pour des savons ludiques aux senteurs fruitées ou bien pour des fragrances comme celles de certains savons reçus dans le swap du forum des Plaisirs...mais cela restera marginal.

Pour la couleur, c'est pareil, je préfère utiliser des couleurs naturelles, poudres d'épices, de plantes tinctoriales, argiles...Pareil, je craquerai peut être par exception sur certains pigments quand je vois le résultat bluffant obtenu par certaines avec des "micas".

Il faut savoir que la coloration naturelle des savons est, comment dirais je...poétique !
En effet, le ontact avec la soude provoque assez souvent des effets saiissants et la coloration habituellement obtenue par ailleurs avec une teinture qu'on croit maîtriser ne sera pas forcément celle obtenue...Donc place à l'expérimentation...

Vous pourrez également libérer votre créativité dans l'usage d'additifs variés, graines et fleurs séchées, épices et inclusions...ainsi que dans le choix des moules. Mais pensez bien à ce que les matières utilisées ne se déforment pas à la chaleur, supportent les éventuels résidus de soude au moment du moulage et à ce que vos moules soient étanches...et permettent le démoulage...Ben oui c'est évident, mais c'est mieux de le dire...

laboratoireLe déroulement des opérations


Je ne vais pas vous refaire ce qui a été si bien fait par d'autres...

Alors je vous renvoie à l'hoolistique blog-notes...
Pour d'autres images vous purrez aussi visiter le  pas à pas de Thomaëlle ...

Juste l'explication de la fameuse trace ! C'est le moment où la pâte de savon prend forme, lorsque le mélange soude-huile se transforme en savon, il épaissit...
Pour voir si le mélange atteint la tace, j'ai lu deux vrsions :
- Il se forme une trace qui reste lorsque qu'on "fait un trait" à la surface du mélange
- Si on laise tomber un peu du mélange sur la surface il ne coule pas et forme une trace.

Dans la pratique, c'est un peu pareil...

Après mon premier essai, je me permets d'insister sur quelques points :

- Bien se protéger
- Bien préparer et peser tous les ingrédients à l'avance, prêts à être utilisés
- Effectuer la phase de dissolution de la soude dans un endroit extrêmement ventilé, si possible effectuer tout le processus dans un endroit aéré. J'ai la chance d'avoir pu travailler totalement sur ma terrasse couverte...
- Bien verser les perles de soude dans l'eau et non le contraire
- Avoir à portée de main une cuvette d'eau froide pour abaisser la température des huiles ou de la soude si nécessaire et un bain-marie qui reste chaud pour réchauffer les huiles si nécessaire
- Avoir à portée de main une réserve d'eau vinaigrée pour neutraliser la soude en cas d'incident

En ce qui concerne les températures, ayant eu cette superbe démo par Hooly, j'ai choisi de retenir la température qu'elle pratique à savoir, 46 à 48 °C pour les huiles et la solution de soude avec donc maximum 2°C d'écart entre les deux. Toutefois, j'ai entrevu quelques indications donnant des températures différentes selon le type d'huile utilisé...ce qui ne semble pas illogique car cela doit influencer la réaction de saponification...Pour le moment, j'en reste à ces températures...

Dernière question métaphysique...Depuis des lustres, que dis je des siècles, non des millénaires, on fait curer le savon, à savoir qu'on le laisse reposer un certain temps après sa fabrication. A mon sens, le but est non seulement d'avoir la certitude que la réaction de saponification soit totale et que le savon ne soit plus caustique (nos ancêtres ne disposaient pas de papier PHmètre), mais aussi de faire sécher le savon afin qu'il durcisse et ne s'use ensuite pas trop vite. Alors, même si il est possible d'utiliser le savon rapidement après sa fabrication selon des savonnières expérimentées, je choisi de le laisser se reposer, quelques semaines (on verra de combien sera ma patience... ;) )

Voilà, je suis arrivée au bout de mon blabla et je peux maintenant passer à ce qu'attendent les curieuses déjà savonnières...Mais comment donc sont les savons de Blue ???

Alors, j'ai choisi pour commencer du basique :

400 g d'huile de coco (j'ai utilisé celle de Velan, à défaut de trouver facilement et à un prix abordable une huile bio
200 g d'huile d'olive bio
Une certaine quantité de soude que je vous laisse déterminer par le calculateur (et oui, il faut prendre de bonnes habitudes, on ne fait jamais confiance à une recette pour la quantité de soude, on recalcule toujours...moi j'ai eu une surprise agréable pour le pesage en arrondissant au gramme inférieur ;-) )
200 ml d'eau

A la trace j'ai ajouté : 50g d'huile de macadamia bio, 8 ml d'huile essentielle de lavandin (j'y suis peut être allée un peu fort mais je voulais que l'odeur tienne et comme c'est l'HE que j'utilise pour ma lessive, je l'achète en quantité plus importante donc moins cher)

J'ai utilisé une plaque de moule silicone en forme de demi-sphères, un régal à démouler...
J'ai coulé le reste dans une boîte à pringles. Inconvénient : ma boîte n'étant pas pleine, je n'ai pas pu recouvrir la surface et le séchage a provoqué une étoile toute fendillée. J'ai trouvé le démoulage très dur, la boîte difficile à déchirer, le fond ne se décollait pas, une pellicule de plastique restait collée sur le savon...bref, je n'ai pas envie de renouveler cette expérince, cela m'évitera en plus de grignotter non bio...

J'ai gardé les rognures je vais les collectionner pour faire de la refonte ou du savon à lessive.

Pour les courageuses (x?) qui sont allées au bout...Tadam ! Les voilà !!!

savons2

savons1

Cliparts en provenance du site Clip-art.fr
Illustration de laboratoire en provenance de ce site
Image d'huile en provenance du site Vegetalcar
Molécule de soude et autres modèles moléculaires ICI

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Commentaires
S
Un petit coucou d'une savonnière débutante, je me suis lancée avec le pasàpas de Thomaëlle, je suis fort contente du résultat, cet article est fort intéressant et m'a permis d'éclairer mes dernières zones d'ombre... je voulais juste te dire merci pour ne pas profitter gratuitement de ton expérience ! bises
J
Merci pour le cours théorique, je ne me suis pas encore lancée, ça s'en vient après un peu plus d'un an à hésité et avoir peur de la soude. J'ai suffisament cultivée ma peur pour être très prudente! Tes explications sont très bonnes et confirme ce que je lis depuis quelques semaines. Bravo pour ta réussite.
F
Félicitations, ils sont très beaux tes savons. Je crois avoir attendu pas loin de deux aussi avant de me lancer.
K
Merveilleux comme explications Blue. Je les ai pris en note et les relirai souvent en précautions. Merci.<br /> <br /> Il avait raison ton fils !! Ils ont l'oeil ces jeunes mâles hein...<br /> <br /> KIM
A
NaOH donne Na+ et OH- en solution, ces ions s'hydratent (ils s'entourent de molécules d'eau) et restent sagement à attendre qu'on y mette les doigts.<br /> La soude ne dégage pas de vapeurs toxiques, mais "juste" irritantes. Je ne sais pas si un masque à poussières protège efficacement contre ces vapeurs. Aucune vapeur ne devrait se former si on procède très lentement et que l'échauffement reste limité. Une autre solution consiste à mettre le bécher dans un "bain marie" refroidi avec des glaçons pour absorber les calories de la dissolution.
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